Aujourd’hui je voudrais commencer à vous parler des clés pour réussir un bon cocktail.
Cet article est l’intro d’une série d’articles qui composent un mini guide du « barman à la maison » en herbe (il peut être utile aussi pour des bartenders, selon leur expérience). Bien que synthétique pour rendre la lecture plus aisée à un maximum de monde, les conclusions sont souvent lourdes de sens car elles sont le fruit des lectures, de la pratique et des quelques gueules de bois (ou plus) de votre humble serviteur. On essayera de couvrir de A à Z et de façon progressive l’ensemble des connaissances qui font d’un mélange éthylique un cocktail digne de ce nom.
Avez-vous déjà acheté un bouquin de cocktails ? Je vous le résume (avec une pointe de sarcasme, vous me connaissez déjà). Prenez 15 pages pourries et complètement évidentes sur les techniques, outils et ingrédients du bar. Ajoutez un compilé de 150 pages de recettes dont l’auteur n’a jamais gouté la moitié (et que vous n’allez sûrement pas lire non plus). Finalement, enlevez toute référence qui puisse faire comprendre au lecteur à quoi pourrait ressembler gustativement la recette, pour que le lecteur ne sache pas comment choisir son cocktail. Bim! la magie est faite.
A l’opposé ce guide essaye de donner de vraies connaissances. C’est un peu ce que j’aurais toujours aimé avoir en lisant un bouquin de cocktails. Bien sûr ceci est plus court, format blog oblige. Une analogie est de rigueur. Imaginez-vous dans une situation où un physicien de renom est votre professeur. Votre défi est d’atteindre une cible avec un projectile. Le physicien vous oblige à répéter 1000 fois des lancers de projectile et vous fait travailler pendant 10 ans jusqu’à ce que vous redécouvriez (et encore si vous avez une chance inouïe) les lois de Newton et que le problème soit trivialisé en deux secondes. Le dit professeur aurait mieux fait de vous donner la loi tout de suite non? Des fois il n’y a rien de plus pratique qu’une bonne théorie.
La question qui se pose maintenant bien sur est: avons nous besoin d’un PhD pour préparer des bons cocktails?
Douchebag Mixologists, Douchebag mixologists everywhere!
Non, et re-non ! A l’oppose d’une vague actuelle qui dérive parfois dans l’arrogance, le cocktail est plus simple qu’il en a l’air. Le look hipster, les grands airs en parlant de Prohibition, les infusions farfelues sont souvent des artifices du show business qui nous éloignent de l’attribut essentiel du cocktail : l’équilibre gustatif. Car certes le cocktail est une expérience sensorielle globale, mais quel est le sens le plus exacerbé ?
Le cocktail est simple*. Voilà, je l’ai dit. Quelques barmen vont me tomber dessus peut-être mais c’est ce que je pense sincèrement. Le cocktail a 120 ans d’histoire réelle (200 ans depuis sa naissance – 80 ans de traversée du désert). Les techniques se ramènent souvent à moins d’une dizaine. Les derniers « meilleurs bartenders du monde » ont parfois à peine la trentaine et 10 ans peut être d’expérience dans le métier. Comparez cela à la cuisine. La cuisine date de la nuit des temps. Les techniques de cuisson et de coupe sont plus complexes. La concurrence est rude ainsi que le système hiérarchique. Un chef étoilé au Michelin a souvent du passer des décennies à faire des boulots inhumains avant de passer sur le devant de la scène. Et puis la haute gastronomie a déjà provoqué une codification complète du métier, ce qui est inexistant du côté du bar.
Préparer un très bon cocktail est quelque chose que tout le monde peut faire chez soi. C’est surement le message fondateur de CocktailMolotov. Avec les bonnes connaissances (pas si difficiles à acquérir comme vous allez le voir dans les prochains articles) on y arrive.
Ce qu’il faut savoir se résume à :
- Connaitre les ingrédients et savoir stocker son bar
- Connaitre les techniques et leur apport sensoriel au cocktail
- Comprendre l’importance du travail de la glace dans le cocktail
- Comprendre les équilibres gustatifs déjà découverts
Maitrisez ces bases et vous saurez préparer la plupart des recettes de manière parfaite. C’est un peu comme si vous maitrisiez les classiques de la cuisine française comme la blanquette de veau, la cuisson d’un magret de canard, la béchamel ou les macarons. Mais le cocktail est un art du détail et vous avez encore du chemin pour arriver à la haute gastronomie. Et c’est là tout l’intérêt.
A vos shakers!
*95% des recettes sont assez faciles à réussir. Les bars de standing et les grands professionnels ont tout le mérite de préparer quelques recettes qui poussent un peu plus loin les limites du cocktail. Ces dernières répondent à un besoin de niche et c’est toujours un plaisir pour qui que ce soit d’aller vivre ce genre d’expérience comme ça peut être le cas à l’Artesian ou au 69 Colebrooke Row de Londres.